SNUipp-FSU du Jura : Nous n’entrerons pas dans l’avenir à reculons !
|
https://39.snuipp.fr/spip.php?article2035
|
Analyse de la circulaire de rentrée 2019
lundi, 8 juillet 2019
/ SNUipp du Jura / Syndicat National Unitaire des Instituteurs, P.E. et P.E.G.C. - BP 832 – 39008 Lons le Saunier Cedex Tél : 03 84 47 12 64 – Fax : 03 84 24 50 21 snu39@snuipp.fr |
Malgré des modifications par rapport au projet initial, cette circulaire demeure très injonctive, centrée sur l’enseignement des fondamentaux « lire, écrire, compter », avec une focale importante sur la maternelle qui voit sa spécificité s’effacer au profit d’une primarisation. Elle confirme le retour des orientations des programmes de 2008 portées par Jean-Michel Blanquer et dessine les contours d’une pédagogie officielle. Sous couvert de pilotage en soutien de l’action pédagogique des professeur-es, il s’agit en fait de surveiller, d’imposer et de transformer les enseignant-es en de simples exécutant-es, privé-es de liberté pédagogique. Cette circulaire est accompagnée de 3 recommandations concernant la maternelle (langage, approche du nombre, langues vivantes étrangères) et des attendus de fin d’année et repères annuels de progression (cycle 2 et 3), publiés au même BO du 22/29 mai 2019.
4 parties, elles-mêmes déclinées en sous parties :
L’école maternelle, école de l’épanouissement et du langage ;
l’acquisition des savoirs fondamentaux par tous les élèves : une priorité nationale ;
un pilotage en soutien de l’action pédagogique des professeurs ;
cultiver le plaisir d’être ensemble.
Sans surprise, ce projet justifie la politique en cours du ministère (dédoublement, pilotage académique, instruction obligatoire à 3 ans) et va plus loin en mettant à la fois un focus sur ce qu’il considère comme « les bonnes pratiques » de la maternelle au CM2, mais aussi sur un encadrement de plus en plus strict des choix et des pratiques pédagogiques à tous les niveaux s’accompagnant de recommandations, de guides (dont cinq, sur le modèle du « guide orange CP » sont annoncés pour la rentrée ) , d’évaluations standardisées et d’un contrôle renforcé déguisé en pilotage en soutien de l’action pédagogique des enseignant-es. Bien loin de l’ambition des programmes de 2015, les missions de la maternelle sont réorientées et minorées, autour de la phonologie, du vocabulaire et de la « préparation aux apprentissages fondamentaux ». Pédagogiquement, cela marque un tournant. L’école maternelle est consacrée comme institution d’instruction, aux dimensions éducatives passées sous silence. Dans les trois recommandations annexées à cette circulaire, les besoins éducatifs et pédagogiques spécifiques aux élèves des milieux populaires ne sont pas pris en compte. Comme dans le guide orange, l’élève dont il est question est un élève idéal-typique qui n’existe pas. Les « recommandations pédagogiques », comme les précédentes, sonnent comme des ordres. En ciblant des priorités d’enseignement, elles incitent à contourner les programmes et à déroger aux obligations horaires au seul profit de sous-domaines du français et des mathématiques. L’objectif d’une culture commune pour tous est abandonné.
Ce projet prétend élever le niveau général des élèves et viser la justice sociale, mais il ne répond pas aux attentes de l’école et écarte toute une série d’activités qui donnent sens à la pratique de la langue et construisent la compréhension. Il enferme ainsi les élèves dans des activités modulaires répétitives comme s’il suffisait de s’entraîner pour apprendre, comprendre et apprendre à comprendre. Cela va priver les élèves issus des milieux populaires de l’accès au sens qui permet d’entrer dans les savoirs scolaires. L’enseignant-e est lui relégué-e au rôle d’exécutant-e à laquelle et auquel on demande de rendre des comptes en mettant en place des évaluations et en incitant à utiliser les ressources sur Eduscol en lien avec les évaluations standardisées. Sous couvert d’accompagnement dont les finalités formatives sont détournées, sont annoncés des visites régulières dans les écoles, un accompagnement serré et une formation avec des partis pris. L’éducation prioritaire est traitée uniquement sous le prisme des dédoublements de classe, rien n’est dit sur la nécessité d’enseigner explicitement, de donner les codes de l’école, comme le préconise pourtant le référentiel de l’Éducation prioritaire.
Tout est misé axé sur un enseignement individualisé mettant de côté l’importance du collectif de travail. Quant aux domaines d’apprentissage, outre les « fondamentaux » qui occupent tout l’espace, l’EMC est traitée au travers de l’approche restrictive du « respecter autrui ». L’histoire, les sciences, l’EPS sont absents du projet. Le programme vélo, l’apprentissage de la natation dès la maternelle, pourtant très médiatisés, ne sont pas abordés. Les arts, le sont succinctement... Les élèves en situation de handicap sont abordés dans la 4ème partie, l’école inclusive étant traitée dans une circulaire à part.
Rien n’est dit sur les missions des futur-es étudiant-es stagiaires.
La circulaire dessine les contours d’une pédagogie officielle transmissive où la coopération, l’entraide entre les élèves, la pédagogie de projet n’ont pas leur place. Quant à la liaison école-collège, elle est passée sous silence, omission d’autant plus étonnante qu’un amendement à la loi sur l’école de la confiance, au nom de cette liaison, proposait de réunir ces structures dans un même établissement .